mail du socius
Cher Monsieur,
Les journées sont très chargées en ces semaines, car la publication du rapport de la Ciase porte des fruits. Il aide en effet des victimes à sortir du silence. Nous avons été contactés depuis le 5 octobre par plusieurs témoins ou personnes victimes de jésuites abuseurs. Cela augmente la charge de travail et explique en particulier pourquoi j’ai tardé à vous répondre. Parmi ces personnes qui nous ont récemment contactés, deux ont reçu mes coordonnées par votre intermédiaire. Je vous en remercie cordialement.
Ensuite le rapport de la Ciase nous éclaire tous sur l’ampleur du problème. Comme vous l’écrivez, même les projections que vous m’aviez partagées sont dépassées. Cette étude en population générale, par un sondage de 28000 personnes, est bien la spécificité du travail de la Ciase par rapport à des commissions semblables dans d’autres pays. Les chiffres sont accablants et confirment votre affirmation : « C’est aussi difficile pour une victime de sortir du silence que de sauter du deuxième étage de la Tour Eiffel ». Vous aurez d’ailleurs remarqué que M. Sauvé a d’ailleurs repris cette citation dans sa présentation du rapport le 5 octobre dernier. L’écart abyssal entre le nombre des personnes victimes identifiées (par la Ciase, par les Cellules d’accueil et d’écoute diverses, par les autorités judiciaires et par les archives diverses) et le nombre réel de personnes victimes illustre cette difficulté à sortir du silence.
Le relais très large du travail effectué par la CIASE et de ses résultats permet à des personnes qui ne l’avaient pas fait jusqu’à présent de sortir du silence, comme nous le constatons par les nombreux contacts que nous avons eus ces derniers jours. Nous ne pouvons cependant pas forcer les personnes victimes à parler, et encore moins à nous parler. Mais elles doivent savoir qu’elles peuvent le faire à tout moment. C’est d’ailleurs leur témoignage qui permet d’identifier les religieux prédateurs. Comme vous le savez, nous avons contacté la presse, à l’occasion de l’appel à témoin de la CIASE. Nous avons relayé dans nos médias et ceux de nos institutions l’invitation à contacter notre cellule d’accueil et d’écoute et nous continuerons de le faire.
Vous arrivez à une estimation de 90 jésuites prédateurs en prenant l’estimation de la Ciase de 3% et évoquez le chiffre de 41 jésuites coupables d’abus sur mineurs. Nous avons de nouveau publié sur notre site internet le nombre de jésuites coupables d’abus sexuels : 40 ont été identifiés suite à des témoignages de personnes victimes (22 sur mineurs et 20 sur majeurs, pour 2 jésuites, il y a eu victimes mineures et majeures). 12 jésuites ont été identifiés par la Ciase pour abus sur mineurs soit 34 jésuites incriminés.
Bien cordialement,
Thierry Dobbelstein sj