A Monseigneu rÉric de Moulins-Beaufort , Pdt de la CEF
Monseigneur,
j’ai lu avec attention le document : « Résolutions votées par les évêques de France le 8 novembre 2021 » La CEF a manifestement fait un très grand pas en avant vers toutes les victimes ( dont je suis) de prêtres pédocriminels.
Mais dans la liste des recommandations de la CIASE que vous apprêtez à examiner, il me semble qu’il en manque deux, très importantes pour les victimes qui n’ont pu parler de leur calvaire à absolument personne ; ils représentent plus de la moitié des 220 000 estimées par la CIASE. (58 % voir § 4.1.1 du rapport de l’Iserm) . La lecture des témoignages des victimes auront du vous convaincre de l’extrême difficulté de parler, et aussi de son importance fondamentale pour entrer enfin dans un chemin d’apaisement.
Les recommandations 28 et 30 évoquent cette question :
Recommandation no 28 : Introduire un dispositif d’enquête de police systématique suivie d’un entretien des victimes de violences sexuelles avec un magistrat lorsque la prescription pénale est acquise.
Recommandation no 30 : Mettre en place, au sein de l’Église, un processus d’éclaircissement des accusations portées en matière de violences sexuelles, lorsque l’auteur est décédé ou l’action publique éteinte.
On peut considérer qu’il y a eu 3 000 prêtres prédateurs ayant fait 220 000 victimes ; soit environ 70 victimes par prêtres !
Si la recommandation 28 pouvait être appliquée, les 130 000 victimes toujours murées dans leur silence seraient approchées par la police et encouragées à parler ; mais il semble illusoire que la police ait les moyens et la motivation de le faire.
Reste donc la recommandation 30 : la CIASE considère qu’il vous revient « d’éclaircirles accusations portées en matière de violences sexuelles », ce que vous pouvez et devez faire en vous rapprochant de tout les personnes, qui, enfants, ont été en contact avec ces prêtres pendant leur activité pastorale.
Ce n’est pas une utopie ; c’est ce que le jésuite Klaus Mertes a fait en 2010, lorsque des anciens élèves du collège de Berlin lui ont dénoncé un prêtre pédocriminel ; c’est ce que j’ai du faire moi-même , la même année, lorsque j’ai constaté que les jésuites de France ne lèveraient pas le petit doigt pour savoir si Gilbert Lamande avait fait d’autres victimes que moi.
Pour conclure je voudrais citer cette phrase du jésuite Patrick C. Goujon dans son livre
« Prière de ne pas abuser » : page 47
« La joie m’a saisi quand le nom de l’agresseur fut prononcé par un autre que moi : je n’avais pas déliré ; j’étais sauvé. Je vis enfin s’ouvrir une enquête. »
Je vous en prie, mettez effectivement en pratique ces deux recommandations 28 & 30 de la CIASE, pour ces 130 000 victimes toujours enfermées dans eux mêmes
cordialement
JP Martin Vallas